1. Les traductions néerlandaises aux XVIème et XVIIème siècles d’écrits politiques contemporains d’abord publiés en latin ou en français, ont joué un rôle essentiel dans la formation de la pensée politique aux Pays-Bas. En effet, la Révolte de ces provinces contre l’Espagne dans la deuxième moitié du XVIème siècle a éprouvé le besoin de penser et de justifier ses actes. Or, peu de textes issus des milieux néerlandais pouvaient, à l’époque, répondre à cette demande. En outre, comme dans toute toute révolte, la tendance fut plutôt de se tourner vers le connu que d’inventer du nouveau[1]. Les acteurs politiques et leur entourage se sont donc appropriés, parmi les textes étrangers, ceux qui pouvaient le mieux répondre à leur propre situation. Il est, de ce fait, essentiel, pour qui veut connaître et comprendre l’histoire des idées politiques aux Pays-Bas, de s’intéresser aux traductions qui ont circulé dans les milieux néerlandais[2]. Tel est ainsi le cas, par exemple, du De jure regni apud Scotos (« Le droit royal chez les Ecossais ») de George Buchanan qui parut en 1579. Humaniste écossais, né en 1506, l’auteur avait fait plusieurs séjours en France, où il avait fréquenté l’Université et les milieux savants, assumant pour vivre des charges de précepteur et de professeur, notamment au Collège de Guyenne. Sa réputation de poète et de dramaturge l’avait fait connaître de la reine Marie Stuart qui, lorsqu’il revint en Ecosse, l’accueillit à la cour et le nomma recteur de l’Académie de Saint Andrew[3]. La situation devait changer radicalement en 1567, lorsque la reine fut accusée d’avoir participé au meurtre de son mari et contrainte à l’abdication. George Buchanan se rangea alors aux côtés de ceux qui dénoncèrent la reine et rédigea un traité pour justifier leur révolte en se fondant sur les lois d’Ecosse et la loi naturelle. Tel est l’objet du De jure regni apud Scotos [4]. L’œuvre est écrite sous forme d’un dialogue entre deux personnages, dont l’un est George Buchanan lui-même et l’autre, son jeune ami, Thomas Maitland qui revient de France et auquel Buchanan demande ce que l’on pense en France du meurtre de Darnley, l’époux de Marie Stuart, et de la déposition de la reine. Maitland avoue qu’il est d’autant plus poussé à rentrer chez lui qu’il ne savait plus comment réfuter les attaques contre l’Ecosse et calmer l’indignation provoquée par les derniers événements. Buchanan lui répond qu’il lui paraît aisé de disculper le peuple écossais et il entreprend alors de le démontrer. Son argumentation invoque l’idée chère aux monarchomaques et aux théoriciens calvinistes en général[5], du pacte qui lie le souverain à ses sujets. Partant d’une description de l’origine de la société civile, il fait du consentement volontaire du peuple le principe premier de l’institution politique. Le roi n’est alors que le délégué du peuple qui peut lui refuser son obéissance s’il outrepasse les limites de son autorité. L’œuvre eut un succès immédiat (elle fut réimprimée dès 1580) et connut ensuite de nombreuses éditions, en Allemagne (Francfort), aux Pays-Bas (Amsterdam, Utrecht), en Angleterre, y compris aux Etats-Unis, en 1766. Ce succès ne vint pas tant de la nouveauté des propositions avancées car l’œuvre renvoie largement aux conceptions philosophiques et politiques de l’Antiquité[6], que du sens que prenaient ces mêmes propositions rapportées au contexte des conflits politico-religieux du moment.
2. On voit d’emblée ce qui, dans cette œuvre, pouvait intéresser
les néerlandais à la même époque. Engagés
dans une révolte contre leur souverain, le roi d’Espagne Philippe
II, ils ne pouvaient que s’identifier à une cause aussi proche
de la leur et reprendre à leur compte une théorie « monarchomaque »
comme celle de George Buchanan . D’où la traduction néerlandaise
qui fut proposée au public en 1598 sous le titre : Tsamenspreeckinghe,
vant recht der Coninghen, ofte overheyt over haere Onderdanen ende der Onderdanen
plicht teghens haer (« Dialogue sur le droit des rois, ou de
l’autorité à l’égard de leurs sujets, et
sur le devoir des sujets à leur égard en vertu de leurs liens
réciproques. D’où l’on peut juger si les provinces
des Pays-Bas ont été rebelles à l’égard
de leur roi, ou le roi un Tyran à leur égard, et de ce fait,
d’après les lois de Dieu, de la Nature et des peuples, a perdu
tout le droit qu’il avait sur eux en tant que suprême autorité,
et les provinces ont été rétablies dans leur ancienne
liberté »). Celle-ci était précédée
d’une longue préface dans laquelle l’auteur de cette traduction,
Ellert de Veer, exposait longuement les similitudes politiques entre les situations
écossaise et néerlandaise et montrait ce qui avait incité
l’auteur et le traducteur à entreprendre, l’un et l’autre,
leurs publications.
L’article qui suit se propose, dans un premier temps, de présenter
les raisons avancées par Ellert de Veer pour justifier son désir
de faire connaître ce texte au public néerlandais et d’évoquer,
au passage, un autre exemple de traduction en néerlandais à
la même époque afin de mettre perspective celle du De jure
regni apud Scotos. On examinera ensuite le travail d’Ellert de Veer,
son degré de fidélité par rapport à l’original
et ce que l’on peut penser des écarts relevés. En effet,
si l’on est incontestablement en présence d’une bonne
traduction, celle-ci constitue aussi, à certains égards,
une interprétation. En troisième lieu, on cherchera à
situer, dans la société néerlandaise de l’époque,
l’auteur du Tsamenspreeckinghe afin d’éclairer les
raisons qui inspirent le traducteur par une meilleure connaissance du milieu
intellectuel et politique auquel il appartient. La traduction de ce texte
offre, en effet, un témoignage éloquent du grand intérêt
rencontré par la pensée monarchomaque aux Pays-Bas[7].
3. La version néerlandaise de l’œuvre de George Buchanan s’ouvre par une dédicace aux Etats provinciaux et généraux des Pays-Bas ainsi qu’aux magistrats des villes. Puis vient une préface de douze pages dans laquelle l’auteur de cette édition explique ce qui, à ses yeux, constitue tout l’intérêt de ce texte au regard de la situation présente des Pays-Bas. L’avenir des provinces – écrit-il – dépend des causes qui sont à l’origine des changements politiques survenus récemment: ces changements sont-ils le fait de la tyrannie de Philippe II ou bien d’une révolte illégitime de ses sujets? La question de la résistance légitime est immédiatement posée et montre qu’elle oriente toute la lecture du texte. Ellert de Veer accuse le roi d’avoir trahi sa mission de « Père et berger de son peuple » en refusant d’entendre les prières qui lui étaient adressées et en envoyant le duc d’Albe pour réprimer toute protestation. Or, dit-il toujours dans cette préface, agir ainsi c’était ignorer gravement qu’il existe un contrat liant réciproquement le prince et ses sujets, comme le montre avec de « solides arguments » le grand historien Buchanan dans son « Dialogue ». Ce livre devrait être « lu et relu », insiste-t-il, « non seulement par tout Magistrat, mais par tout homme » vivant à notre époque. « C’est la raison pour laquelle – conclut-il – j’ai voulu transposer ce texte dans notre langue, afin que chacun puisse en tirer le même profit»[8].
4. Le traité de Buchanan ne fut pas le seul de ces écrits issus du milieu des monarchomaques à paraître dans une version néerlandaise. Mais il est sans doute celui qui le fut le plus fidèlement et intégralement. Dix ans plus tôt, une traduction avait été publiée d’un texte de François Hotman, non pas la Franco-Gallia (dont on ne connaît pas de traduction en néerlandais) mais le Brutum Fulmen, paru en latin à Genève, sans nom d’auteur, en 1586[9]. Ce cas est un bon exemple d’un autre mode d’appropriation en vernaculaire d’une production étrangère. Dans cette œuvre, écrite pour protester contre l’excommunication prononcée par le pape Sixte V à l’encontre du roi Henri de Navarre et du Prince de Condé, Hotman s’indignait de la prétendue compétence papale à délier les sujets d’un roi de leur devoir d’obéissance[10]. En 1588, à Leyde, il en parut, sous la plume de Petrus Hackius une traduction néerlandaise que son auteur dédiait aux Etats de Hollande en soulignant, comme Ellert de Veer un peu plus tard, l’utilité que l’on pouvait tirer de cet ouvrage dans la situation présente des Pays-bas[11]. En effet, la sanction papale à l’égard du roi de Navarre ne devait-elle pas servir de mise en garde contre le caractère fallacieux de toute proposition de paix avancée par l’Espagne, sachant combien Philippe II était inféodé au pape Sixte V? Le but recherché par le traducteur était ici tout à fait comparable à celui qui guidera un peu plus tard Ellert de Veer dans sa traduction de George Buchanan, à ceci près que dans le cas du Brutum fulmen, s’agissant de la traduction proprement dite, la démarche s’affirmait d’emblée très différente car l’auteur ne cachait pas la nécessité qu’il avait éprouvée d’ajouter au texte des développements et de nombreux exemples afin de le rendre intelligible au « commun des néerlandais ». « Certains, » disait-il dans sa préface, « ayant lu le livre dans son édition latine, me blâmeront de ne pas m’être contenté du travail original d’un homme si excellent et érudit (...) et d’avoir pris l’initiative de le renforcer, de le développer, de l’éclairer à l’aide de nombreux exemples. (...) Il est aisé, cependant, de leur répondre (...). L’auteur ayant écrit en latin à l’intention des personnes cultivées, voire des personnes les plus savantes et les plus intelligentes de son pays (comme il convient qu’elles le soient), c’est-à-dire Messieurs les Etats, le Conseil du roi, les membres du Parlement, et tous les autres grands de la France, il leur a à peine suggéré ces choses à l’aide de formules très brèves et concises. Mais pour ma part, j’ai entrepris de les communiquer dans un bon et simple néerlandais, aux gens ordinaires de ces provinces qui n’entendent, pour la plupart, pas grand-chose à ces questions du fait que notre langue n’est pas pratiquée comme il conviendrait, les érudits préférant apprendre les langues étrangères. (...) On ne saurait donc me reprocher d’avoir voulu mettre cette matière sous une forme à la fois plus développée et plus simple»[12]. Petrus Hackius ne prétendait pas avoir suivi à la lettre le texte latin d’origine mais plutôt cherché à le rendre accessible à un public moins rompu aux discussions savantes. En revanche, même si, comme on va le voir, la version néerlandaise du De jure regni apud Scotos présente plusieurs types de variantes par rapport à l’original qu’elle traduit, celles-ci, bien que plus discrètes, s’avèrent paradoxalement plus remarquables vu la fidélité d’ensemble du travail linguistique, comme si le traducteur, tout en s’imposant un respect scrupuleux du texte, n’avait pu s’empêcher de l’infléchir par endroits pour donner plus d’évidence à son message.
5. Le collationnement du texte original en latin avec sa version en néerlandais
fait, en effet, apparaître plusieurs variantes notables, toutes clairement
significatives. La première et la plus évidente est celle que
présente le titre : Ellert de Veer a substitué au titre
latin – extrêmement bref : De jure regni apud Scotos[13]
– un titre néerlandais beaucoup plus développé, qui
vise à renseigner dès la première page sur le contenu
de l’ouvrage : « Dialogue sur le droit des Rois, ou de
l’Autorité à l’égard de leurs sujets, et
sur le devoir des sujets à leur égard en vertu de leurs liens
réciproques. D’où l’on peut juger si les provinces
des Pays-Bas ont été rebelles à l’égard
de leur roi ou le roi un Tyran à leur égard et considérer,
de ce fait, que d’après les lois de Dieu, de la Nature et des
peuples, il a perdu tout le droit qu’il avait sur eux en tant que suprême
autorité et les provinces se sont trouvées rétablies
dans leur ancienne liberté »[14].
Dès ces quelques lignes, se confirme l’intention du traducteur,
comme on l’a vu plus haut. Il s’agit de faire jouer au texte ainsi
transposé en néerlandais une fonction théorique et politique
décisive, celle de montrer que la révolte qui a dressé
les habitants des Pays-Bas contre l’Espagne était légitime.
Et comme pour étayer son argumentation, le traducteur fournit à
la fin de l’ouvrage le texte de la sentence prononcée en février
1568 par l’Espagne qui déclarait les provinces des Pays-Bas « hérétiques
et rebelles », coupables de « crime de lèse majesté »[15].
En dessous de ce titre figure une illustration où l’on voit quatre
personnages qui mettent en image le verset inscrit au bas du cadre :
« La méfiance est l’arme la plus forte contre le tyran.
Plus d’un homme s’est laissé abuser en accordant sa confiance
trop à la légère ». Deux personnages au centre
de l’image, tenant chacun un glaive, incarnent la « méfiance »
(« Diffidentia ») et la défense des autels et des
foyers (« Pro aris et focis »). Ils sont flanqués
chacun d’un autre personnage qui leur tend un rameau de paix tout en
cachant dans son dos un glaive, l’un et l’autre figurant « la
tyrannie dissimulée » (« Fucata tyrannis »).
Assise par terre, « Dalila Samsonis » rappelle la trahison
qu’elle perpétra à l’égard de Samson. La
fonction de propagande jouée par cette image est explicitée
par les deux versets qu’elle illustre: la tyrannie déguisée
avec un rameau de paix (mensonger) à la main et un glaive caché
derrière son dos, et les personnages « armés »
de méfiance, défenseurs des autels et des foyers, qui tiennent
la tyrannie en respect[16].
6. A ces deux premières interventions du traducteur, s’en ajoutent d’autres. D’abord, celle que constitue la brève adresse (22 lignes) au lecteur dans laquelle Ellert de Veer rappelle l’événement qui est à l’origine de ce livre et résume les termes dans lesquels le problème s’est posé en Ecosse, en faisant parler, au discours direct, un protagoniste écossais : « Je blâme volontiers cet acte qui constitue une trahison mais je m’oppose à ceux qui veulent, pour cela, punir le roi ». De là est née la dispute qui fournit le thème de ce dialogue : la question de savoir si les rois sont passibles de sanctions ou si les lois doivent s’incliner devant lui. On connaît la réponse de Buchanan – qui est aussi celle du traducteur – : les rois sont institués dans l’intérêt des peuples, mais, dans l’intérêt des peuples aussi, des lois ont été créées pour encadrer le pouvoir royal, qui reste un pouvoir humain et donc soumis aux passions. Enfin, troisième intervention majeure visant à faciliter la compréhension du lecteur : Ellert de Veer ponctue régulièrement le déroulement du texte d’annotations marginales qui en soulignent les articulations principales et fournissent les rubriques d’une sorte de table des matières (« Register van de principale Artijckelen », Fol.68 : «Registre des principaux articles»). Celle-ci, absente du texte latin original, se trouve placée à la fin du Tsamenspreeckinghe. Il est évident que le découpage ainsi opéré dans le texte propose d’emblée – que le traducteur le veuille ou non - une certaine lecture qui tend à attirer l’attention sur certains points de l’argumentation du simple fait qu’elle ne l’attire pas sur d’autres. On remarque, ainsi par exemple, qu’Ellert de Veer ne relève pas l’idée d’un roi idéal (Fol. 18), ni celle de l’absolutisme présenté par Buchanan comme doué d’une antériorité ontologique et historique (Fol. 11). De même, il ne signale pas en marge, ni n’indique dans la table des matières, l’objection de Maitland suggérant qu’il peut être préférable, dans certains cas, de supporter un tyran plutôt que d’envisager un remède aussi risqué que celui de le déposer. L’objection est classique, mais elle n’est visiblement pas opportune aux yeux du traducteur.
7. A côté de ce type de variantes qui sont les premières
à se présenter, il en est d’autres plus discrètes
mais non moins significatives à leur façon : ce sont, d’une
part, les redoublements de mots, d’autre part, les incises. Certes,
la pratique des redoublements était courante à l’époque,
lorsqu’on passait du latin au vernaculaire, l’un des deux termes
étant celui d’origine latine à côté de l’autre,
reconstruit selon les exigences de la langue vernaculaire. Ils tiennent au
fait que les langues « nationales » ne cessaient de se
constituer et de s’enrichir depuis la fin du XVIème siècle[17].
Aux Pays-Bas, cette évolution s’est particulièrement marquée
avec l’émancipation politique à l’égard de
l’Espagne et doit beaucoup à des gens qui, comme le grand ingénieur
et mathématicien Simon Stevin[18],
conseiller du prince Maurice de Nassau, ont contribué à l’émergence
culturelle et scientifique du nouvel Etat.
Citons quelques exemples parmi d’autres. On a ainsi, dès le début :
- pour « aequitatem » (p.10)[19]
: « recht en billicheyt » (« le droit et l’équité »)
(Fol. 4)
- pour « conciliatricem hominum » (p.16): « by-een-woninge,
versellinge ende vergaderinghe der menschen » (« cohabitation,
compagnie, rassemblement des hommes ») (Fol. 6)
- pour « ordini naturae » (p.16) : « schickinge
ofte ordening der natueren » (« la disposition ou l’ordre
de la nature ») (Fol.6)
- pour « libido » (p.34) : « de wil en
begeerte » (« le vouloir et le désir »)
(Fol. 12)
- pour « eandem scilicet Dei et naturae vocem esse » (p.50) :
« God ende de natuere eenderley spreeckt ende gebiet »
(« Dieu et la nature parlent et ordonnent de la même façon »).
Mais ces redoublements viennent aussi, il va sans dire, de la très
grande concision du latin. L’un des exemples cités ci-dessus
est à cet égard très représentatif : la richesse
sémantique d’un terme comme « conciliatrix »
- qui appartient au lexique cicéronien du De Officiis[20]
et qui signifie à la fois l’union, l’association, le fait
de rapprocher, de servir d’intermédiaire - , nécessitait
évidemment le recours à plusieurs équivalents en vernaculaire.
8. Il est intéressant d’évoquer ici les remarques adressées,
en 1583, par Juste Lipse à Joannes Moretus (le gendre de Christophe
Plantin) qui s’apprêtait à traduire son De Constantia
en néerlandais[21] et lui
en avait montré un échantillon afin d’avoir son accord.
Dans une lettre datée du 11 septembre 1589, Lipse écrit ainsi :
« J’ai vu le specimen et je l’ai trouvé bon.
Mais je voudrais que tu te permettes certaines choses en plus et que tu ne
suives pas les traces du discours latin d’un pied aussi sûr. Cette
application rend la traduction resserrée, concise, chétive,
souvent obscure. Chaque langue a son génie que l’on ne peut pas
lui retirer ni la contraindre aisément à transporter dans un
corps étranger. (...) Que de choses correctes et qui se tiennent bien
qui, dans une autre langue, tombent ou chancellent. (...) Ecarte toi donc :
la bonne méthode sera de ne pas suivre la même voie »[22].
Ce que recommandait Juste Lipse était clair : il ne faut pas traduire
un texte à la lettre, mais viser à en restituer le sens.
Si Moretus semble avoir tenu compte des conseils de l’auteur, en revanche,
il est intervenu d’une toute autre façon, d’une façon
qui ne relève plus de l’acte de traduire mais de celui de la
censure. En effet, il a écarté de sa traduction trois
chapitres du premier livre (XVIII, XIX, XX), ceux qui traitent du Destin et
qu’il considérait, à l’instar d’un certain
nombre de ses contemporains, comme inconciliables avec la doctrine chrétienne.
Ce qu’il faut noter ici ce sont les termes dans lesquels il présente
les raisons de cette censure : d’une part, ces trois chapitres
lui paraissent – dit-il – ne consister qu’en « Définitions,
opinions et jugements de philosophes (...) difficiles à rendre dans
notre langue »; mais « surtout - ajoute-t-il -,
l’homme ordinaire trouverait ces choses bien trop élevées
et difficiles et cela, au lieu de le soutenir le ferait douter. Mieux vaut
laisser ces choses aux érudits »[23].
La traduction porte donc, à ses yeux, une responsabilité morale
qui va bien au-delà de la seule responsabilité linguistique.
9. Rien de tout cela dans la traduction d’Ellert de Veer où l’œuvre originale n’a subi aucune censure proprement dite. Il n’empêche, comme on vient de le voir, que l’intervention de l’auteur n’est pas absente mais elle se trahit de manière plus subtile. En effet, même s’il ne faut pas surestimer la portée sémantique de ces redoublements, qui relèvent d’une pratique courante, on peut penser cependant, devant certains choix, qu’ils constituent plus qu’une simple paraphrase et représentent déjà une forme d’interprétation du texte. C’est le cas pour l’expression « quae nova omnia » (p. 10) (employée à propos du peuple inculte qui stigmatise tout ce qu’il ne connaît pas) que le traducteur choisit de rendre en néerlandais par l’expression: « alle veranderinge ende nieuwigheyt » (Fol. 4). On est frappé de trouver là un des leit-motiv de la propagande anti-espagnole diffusée dans les provinces néerlandaises : toute « nouveauté » était assimilée à un changement qui, en cela, contrevenait aux privilèges du pays et rompait donc le contrat passé entre le souverain et ses sujets (selon l’interprétation qu’on faisait alors des privilèges). L’habitude était très vite venue de comprendre en ces termes ce qui était nouveau sur le plan politique ou religieux. Certains choix de vocabulaire opérés pour ces redoublements apparaissent donc comme d’évidents emprunts au lexique politique du moment. Il importe aussi de relever les incises qui sont toujours très significatives. Ainsi, par exemple, lorsque l’auteur écossais parle de ces cités où « les commandements qui venaient des lois étaient plus puissants que ceux qui venaient des hommes » (« ... apud quos potentiora fuerint legum, quam hominum imperia », p.34), le néerlandais ajoute entre parenthèses : « celles-ci étant l’Autorité » (« de Overheyt zjinde », Fol. 12) afin de bien mettre l’accent sur des modèles de gouvernement où ce sont les lois qui l’ont emporté sur les hommes. De même, un peu plus loin, à propos d’une définition du roi qui élèverait si haut sa majesté qu’elle en ferait un personnage sacré « auquel » – ajoute le néerlandais – « on ne pourrait pas s’opposer » («... daermen niet teghen doen mochten » (Fol.13)[24]. Le latin ne mentionne pas cette conséquence. Autre exemple, encore : lorsqu’il est question des « éphores » qui siègent aux côtés du roi, Ellert de Veer ajoute qu’ils l’assistent pour que lui soit « adjoint » le peuple en tant que « Conseil du Royaume »[25]. Il y a là une volonté très sensible d’infléchir le sens de la lecture des contemporains néerlandais auxquels s’adresse cette traduction. Ainsi se confirme l’influence d’une actualité politique déterminée sur le sens imprimé par Ellert de Veer à sa traduction de Buchanan.
10. Entreprendre en 1598 la traduction en néerlandais d’un texte
monarchomaque visait à répondre aux données d’une
situation politique précise qui n’est plus celle des années
1567-1568, aussi cruciales pour l’Ecosse que pour les Pays-Bas, mais
celle des débuts de l’autonomie politique des Pays-Bas. En effet,
en 1598, les provinces réunies dans l’Union d’Utrecht de
1579 – c’est-à-dire les futures Provinces-Unies –
abordent la période qu’on appelle les « Tien Jaren »,
les « Dix Ans », premières années d’une
administration indépendante puisque les Etats généraux
et provinciaux deviennent seuls responsables, avec le « Stadhouder »,
de la politique du pays. Ce nouvel état va commencer à écrire
son histoire et à se forger une conscience nationale. Cette
période est moins celle de l’action que de l’écriture
de l’action[26]. Il s’agit
alors de faire retour sur les « changements récents »
(comme le dit la préface néerlandaise au traité de Buchanan)
pour les expliquer et les justifier. C’est ce à quoi vont s’appliquer
un certain nombre d’historiens de ces années-là, comme
Jan van der Does (Dousa), le premier bibliothécaire de l’Université
de Leyde, Adriaen de Jonghe, le grand philologue et érudit qu’estimait
Juste Lipse, et, bien sûr, Grotius qui rédige, à la demande
des Etats de Hollande, ses « Annales et histoire des troubles des
Pays-Bas »[27].
Mais Ellert de Veer – que l’on trouve dans l’entourage du
grand bourgmestre d’Amsterdam, C.P. Hooft, en 1598[28]
- n’écrit pas seulement pour les historiens ou les « magistrats »,
il veut aussi informer l’opinion publique. En effet, il dit bien
dans sa préface qu’il écrit pour « tout homme »,
de la même manière que Petrus Hackius, traduisant le Brutum
fulmen de François Hotman, déclarait s’adresser à
l’homme ordinaire, comme on l’a vu plus haut. Il est vrai que
l’opinion publique néerlandaise a joué un grand rôle
dans la révolte contre l’Espagne, à partir de 1566. C’est
même peut-être un des premiers exemples d’une opinion publique
sciemment mise en œuvre et utilisée pour appuyer l’action
politique sur le terrain. Or, s’agissant de l’ « homme
ordinaire », on ne pouvait compter sur sa capacité à
lire en latin, il fallait faire circuler des textes en vernaculaire,
simples, sans trop de « définitions, opinions et jugements
de philosophes », comme l’écrivait Johannes Moretus.
C’est donc bien là une des fonctions principales d’une
traduction comme celle du De jure regni apud Scotos de Buchanan –
et de là en partie, aussi, l’origine des écarts qu’on
peut relever avec l’original.
11. En revanche, il était moins nécessaire, pour un chef politique
ou un juriste, de disposer d’un texte dans sa langue nationale :
l’exemple d’Aggaeus Albada est à ce titre très intéressant
et invite à évoquer rapidement un autre cas de lecture néerlandaise
d’un texte monarchomaque. Secrétaire de la conférence
de Cologne, en 1579 (qui représentait l’ultime tentative pour
trouver un compromis entre les Espagnols et les provinces), Albada rédigea,
à la demande des Etats généraux, le compte-rendu de ces
négociations afin de le publier pour témoigner de la bonne volonté
des provinces[29]. Il est frappant
de constater à quel point les Vindiciae contra tyrannos de Junius
Brutus – autre texte monarchomaque fameux – constituent une des
références constantes de ce juriste, à coté d’autres
auteurs couramment cités à l’époque comme ceux
de l’école de Salamanque (Soto, Vasquez), de Machiavel, de Bodin,
et d’autres : dès qu’il s’agit d’affirmer
que les rois ne sont pas seulement institués pour le peuple,
mais par le peuple, Albada évoque ce texte de Junius Brutus.
C’est là un des témoignages les plus remarquables de la
fonction immédiatement pratique qu’ont exercé ces
textes théoriques. Pourtant, très curieusement, les Vindiciae
n’ont jamais fait l’objet d’une traduction en néerlandais.
Même si Albada y renvoie en donnant une version néerlandaise
du titre (« Junius Brutus in tboeck dat ghenoemt is Sententien teghen
de Tyrannen... »)[30],
on ne connaît pas à ce jour de traduction néerlandaise
du texte[31].
En 1586, parut simplement un résumé de ce texte sous
la plume de Frans Coornhert, le frère de Dirk Coornhert, le grand apologiste
de la tolérance : Cort onderwijs eens Liefhebbers des welstandts
deser Nederlanden, waerinne allen Christenen goede ghemeenten en Patriotten
claerlijck bewesen wort : Dat het wel gheoorloft is tegen te staen een
Coning ofte Here vande Landen, die Godt ende zijn heylich woort onderstaet
te verdrijven (...) (« Bref résumé d’un
affectionné de ces Pays-Bas dans lequel il est montré à
toutes les bonnes gens et aux Patriotes chrétiens qu’il est permis
de s’opposer à un roi ou seigneur du pays qui entreprend d’éliminer
la sainte parole de Dieu »)[32].
Ce résumé n’a évidemment rien à voir avec
une traduction : en effet, Frans Coornhert annonce aux Bourgmestres d’Amsterdam
– auxquels il dédie son texte – qu’il a eu entre
les mains un livre d’un dénommé Junius Brutus Schelta,
livre dans lequel il a trouvé des choses fort utiles pour le temps
présent, mais que ce texte étant si « riche, si abondant
et si copieux » (« rijckelijk, copioselijk en overvloedelijk »),
qu’il ferait un trop gros volume et que personne ne le lirait jusqu’au
bout. Aussi, afin d’être immédiatement utile au public,
il n’en donnera que la « substantifique moëlle »,
selon l’expression de Montaigne qui correspond ici exactement à
ce que dit Coornhert: « die substantitie ende t’murch ».
En 1586, le moral des provinces était en crise, la chute d’Anvers
en faisait douter plus d’un sur l’issue de la révolte contre
l’Espagne, il fallait donc nourrir rapidement l’action avec des
représentations et des concepts aisés à assimilés.
D’où ce résumé.
12. Le Tsamenspreeckinghe, vant recht der Coninghen, ofte overheyt over
haere Onderdanen ende der Onderdanen plicht teghens haer introduit aux
Pays-Bas un texte essentiel de la pensée monarchomaque et constitue
un jalon précieux dans notre connaissance des voies empruntées
par l’influence de ces auteurs dans ces régions, en même
temps qu’il fournit une information très éclairante sur
les milieux qui ont favorisé et encouragé la circulation de
leurs idées. Il est certain qu’une communauté de pensée
réunissait les esprits qui soutenaient l’instauration d’une
« république » aux Pays-Bas tout en suivant, au
même moment, avec intérêt les développements de
la politique française. C’est en effet dans le milieu des « politiques »
néerlandais, auquel appartenaient Frans Coornhert et son frère
Dirk, qu’ont été lus et traduits certains discours du
roi de Navarre[33] et qu’ont
trouvé naissance une partie des conceptions politiques originales qui
allaient donner à la République des Provinces-Unies son armature
conceptuelle si caractéristique[34].
Mais il fallait l’œuvre des traducteurs et c’est en cela
qu’il est intéressant de se pencher sur le détail de leur
contribution. Celle d’Ellert de Veer présente toutes les qualités
d’une bonne traduction, nous l’avons dit, même si en opérant
certaines retouches formelles, conceptuelles et lexicales, elle oriente subtilement
la compréhension de son lecteur dans un sens déterminé.
Ce sens est celui qu’inspirait au traducteur le parti qui fut le sien
face aux événements contemporains, à savoir la défense
de la supériorité du peuple sur le roi et le droit du peuple
à juger, voire à déposer, son roi en cas de gouvernement
« tyrannique ». L’intention, sur ce point, du traducteur
est d’autant plus réelle qu’elle est discrète :
il n’a pas cherché à gloser longuement, ou au contraire
à censurer ou modifier certains passages du texte. Son action s’est
limitée à des touches légères qui peuvent fort
bien passer inaperçues. En revanche – et c’est ce qui,
par comparaison, nous donne la mesure de son intention -, il n’a pas
hésité à prendre plus de libertés avec un texte
comme celui de Sénèque que Buchanan avait placé en appendice
à son dialogue[35]. A comparer
l’un et l’autre, il nous semble qu’Ellert de Veer a enjolivé
à plaisir le latin pour donner à la peinture du « Roi
stoïcien » quelque chose de plus attrayant. Ainsi, par exemple,
dans un passage comme le suivant: « La richesse, la grandeur, la
puissance, les vêtements tissés de pourpre, travaillés
avec de la soie, de l’or, des pierres précieuses et des perles/Des
palais coûteux qui montent jusqu’au ciel, recouverts de toits
d’or/Le fait de s’avancer avec splendeur, couronné d’un
diadème/Est-ce cela qui fait les rois ? Je dis non/Mais celui
qui, d’un courage viril, écarte de lui toute crainte/ne laisse
ni les flagorneries ni l’envie émouvoir son cœur/et n’éprouve
nulle mauvaise conscience face au sentiment que fait naître l’or
des Indes et du Tage, celui-ci doit être tenu pour un roi»[36],
le lecteur néerlandais se voit proposer une version visiblement enrichie
d’images supplémentaires. L’importance des libertés
que le traducteur s’est s’accordée ici montre qu’il
a su, en revanche, retenir sa part d’intervention dans tout le texte
de Buchanan et respecter la pensée de l’auteur originel.
Si l’on voulait établir une typologie des traductions, celle
donnée par Ellert de Veer du De jure regni apud Scotos de Buchanan
s’inscrirait entre le modèle qui résume (les Vindiciae
contra tyrannos par Frans Coornhert), et celui qui censure (le De Constantia
par Joannes Moretus), en passant par celui qui respecte tout en aidant
à comprendre (le Brutum fulmen de Hotman). Mais surtout, suprême
éloge, on peut penser qu’un aussi éminent éditeur
et traducteur de textes que Juste Lipse aurait vu dans le travail d’Ellert
de Veer précisément ce qu’il recommandait à Joannes
Moretus à propos de sa traduction du De constantia, à
savoir d’adopter la seule bonne méthode, celle qui se donne comme
objectif de s’écarter sans trahir : « rectam in
vertendo viam tenere, viam non tenere »[37].
[1]« Aussi longtemps que le droit de résistance demeurait fondé sur la défense des privilèges, ou sur les privilèges eux-mêmes, on excluait la possibilité de faire évoluer la théorie vers de nouvelles formules », Ernst H. Kossmann, « Bodin, Althusius et Parker – ou de la modernité de la Révolte des Pays-Bas », in Théorie politique et histoire, Naples, Vivarium, 2003, p. 99 ; cf. C. SECRETAN, Les privilèges, berceau de la liberté, Paris, Vrin, 1990, pp. 28-35.
[2] Comme le souligne fort bien C. L. THIJSSEN-SCHOUTE : « L’examen de ce qui est traduit est toujours très instructif ; cela vaut particulièrement pour un pays comme le nôtre qui, également sur le plan spirituel, fut une région de transit et de port franc », Uit de Republiek der letteren, La Haye, Nijhoff, 1967, p. 44.
[3] Il importe de souligner ici que la poésie néo-latine de George Buchanan, très appréciée des membres du cercle de Philippe Sidney, l’était aussi de certains milieux néerlandais autour de Jan van Hout et Jan van der Does (Janus Dousa) et que des contacts entre l’Angleterre et Leyde semblent avoir mis Buchanan en relation avec certains auteurs néerlandais. Il n’était donc pas inconnu aux Pays-Bas, cf. J.A. van DORSTEN, Poets, Patrons, and Professors, Universitaire Pers Leiden, 1962, p. 41 sqq.
[4] Ce texte a fait récemment l’objet d’une excellente édition et traduction en anglais, cf. R. A. MASON et M. S. SMITH, A Dialogue on the Law of Kingship among the Scots. A critical Edition and Translation of George Buchanan’s De Iure Regni apud Scotos Dialogus, Ashgate, St. Andrews studies in Reformation History, 2004. C’est aux pages de cette édition que je renvoie pour le texte latin.
[5] Et de sa bouche sortait un glaive. Les monarchomaques au XVIème siècle, études réunies par P.-A. MELLET, Genève, Droz, 2006; Le droit de résistance, textes réunis par J.-Cl. ZANCARINI, Lyon, ENS Editions, 2001.
[6] R. A. MASON et M. S. SMITH, dans leur édition du De jure regni apud Scotos, soulignent avec une grande précision tout ce que ce texte emprunte aux auteurs antiques (Platon, Aristote, Xénophon, Cicéron, Tite-Live, Horace,...), ce qui ajoute à cette édition l’intérêt d’illustrer excellemment comment et à quelles fins s’est opérée la réappropriation des textes antiques au XVIème siècle.
[7] Il n’existe pas, pour l’instant, de synthèse sur la présence des écrits monarchomaques en vernaculaire aux Pays-Bas, mais on trouve d’utiles indications dans Ch. MERCIER, « Les théories politiques des calvinistes dans les Pays-Bas à la fin du XVIème et au début du XVIIème siècle », Revue d’Histoire ecclésiastique de Louvain, 1933; J. LERCLER fournit également des références précises dans son Histoire de la tolérance au siècle de la Réforme, Paris, Aubier, 1955, t. II.
[8] Tsamenspreeckinghe, Voor-reden, B3.
[9] Brutum fulmen papae Sixti V adversus Henricum Sereniss. Regem Navarrae et illustrissimum Henricum Borbonium principem Condaeum. Una cum protestatione multiplicis nullitatis, (s.l.n.d.).
[10] A la mort du duc d’Alençon, dernier frère du roi Henri III, le roi de Navarre, chef du parti protestant, était devenu l’héritier de la couronne de France. Il montera sur le trône en 1589.
[11] Brutum fulmen, dat is crachteloose Blixem. Daer mede wort bewesen dat de Verclaringe des Bans uytghesproken vanden teghenwoordighen Paus Sixto Quinto teghen den Doorluchtichsten Prince Henrick van Bourbon, Coninck van Navarre en zijnes Doms sone mede, Henric van Bourbon, den doorluchtigen Prince van Conde, bij allen menschen is te achten voor ydel ende van gheener macht ende weerde. Eerst wel int tcort door eenen hooch gheleerden man beschreven in Latijnscher sprake, maer nu den eenvoudighen Batavieren ten goede, in Nederduytscher Tale vry al wat langer ende breeder uytgestrect ende verlichtet, door Petrum Hackium, Lugd. Batavum. Tot Leyden, By Jan Paedts Jacobsz. ende Jan Bouwensz., 1588.
[12] Brutum fulmen, dat is crachteloose Blixem, op.cit., p. 4-6.
[13] Cf. Figure 1 : De jure regni apud Scotos, 1579 (extrait de John Durkan, A Bibliography of George Buchanan, Glasgow, 1994, p. 209).
[14] Cf. Figure 2 : Tsamenspreeckinghe vant recht der Coninghen..., 1598 (Extrait de John Durkan, A Bibliography, op.cit., p. 213).
[15] Tsamenspreeckinghe, Fol. 67.
[16] Je tiens à remercier ici Anton van der Lem, conservateur à la Bibliothèque de Leyde, pour ses précieuses indications dans le déchiffrement de cette illustration.
[17] R. CHARTIER & P. CORSI, Sciences et langues en Europe, Paris, EHESS, 1996.
[18] M. van der WAL, Geschiedenis van het Nederlands, en collaboration avec C. van BREE, Utrecht, Het Spectrum, 1994 (1ère édition: 1992).
[19] Comme annoncé plus haut, je renvoie, pour le texte latin, à l’édition publiée par R. A. MASON et M. S. SMITH, A Dialogue on the Law of Kingship among the Scots, op.cit.
[20] On trouve ainsi ce terme dans des expressions telles que : « communem totius generis hominum conciliationem et consociationem », Cicéron, De Officiis (trad. fr. Les devoirs, Paris, Les Belles lettres, 1974), I, 149 : « ... c’est l’union et la société communes de toute la race des hommes que nous devons honorer, protéger, sauvegarder » ; « ...ratio et oratio (...) quae (...) conciliat inter se homines: « Le lien de cette société c’est la raison et la parole (...) qui (...) associent les hommes entre eux », id., I, 50.
[21] Cf. H. van CROMBRUGGEN, Twee boecken van de Stantvasticheyt, vertaald door J. Mourentorf, Amsterdam, “Onze Oude Letteren”, 1948.
[22] Iusti Lipsi Epistolae, I, M.A. NAUWELAERTS, Brussels, 1983, 83 09 11 M., cité par N. MOUT, « The reception of De Constantia » in K. ENENKEL & Ch. HEESAKKERS, (éds.), Lipsius in Leiden (ces trois chapitres traitent en effet des différentes formes de Destin qui sont définies et « expliquées brièvement » : celui des mathématiciens, celui des stoïciens, celui qu’on appelle la « Providence divine »).
[23] Il justifie sa décision dans l’ « Avertisssement au lecteur » qu’il place à la fin du chap. XVII, juste avant les trois chapitres non traduits (XVIII, XIX, XX), cf. H. van CROMBRUGGEN, Twee boecken van de Stantvasticheyt, vertaald door J. Mourentorf, op.cit., p. 52.
[24] Le latin dit simplement : « ... ita Reges laudaveras, ut eorum majestatem prope augustam & sacrosanctam faceres », p. 34.
[25] “... dit waren byzitters, die hem het Volck byghevoecht hadden als Raden des Rijcks”, Fol. 41.
[26] H. KAMPINGA, Opvattingen over onze Vaderlandse Geschiedenis, Utrecht, H&S Publishers, 1980.
[27] J. DOUSA, Bataviae Hollandiaeque Annales (1601) ; A. de JONGHE, Batavia (1588) ; H. GROTIUS, Annales et historiae de rebus Belgicis (publication posthume en 1657).
[28] Cf. C.P. HOOFT, Memoriën en Adviezen, uitg. en toegelicht door H.A. ENNO van GELDER, Utrecht, 1925, p. 30.
[29] Acten van den vredehandel, gheschiet te Colen ... tusschen d'ambassadeurs ende ghesanten des doorluchtichsten Conincs van Spaignen, ende Matthias Aertshertog van Oostenrijck, gouverneur etc. ende den Staten van Nederlant : verciert met ... annotatien ende verclaringhen ... ende overgeset inde nederduytsche sprake. Tot Leyden, By Charles Silvius ..., 1580.
[30] Id., p. 24.
[31]. Il y a bien eu un projet pour une telle entreprise (les Etats de Hollande ayant donné un accord de six mois à leur imprimeur Willem Silvius pour qu’il publie une version néerlandaise de ce texte), mais le travail n’a jamais vu le jour.
[32]. W.P.C. KNUTTEL, Catalogus van de pamfletten-verzameling berustende in de Koninklijke Bibliotheek, La Haye, 1889-1920, n° 767; K. van BERKEL, “Frans Volckertsz. Coornhert en zijn vertaling van de Vindiciae contra tyrannos (1586) », Jaarboek Genootschap Amstelodamum, 72, 1980, p. 10-22.
[33]. Cf. l’analyse et l’hypothèse que je propose dans mon article sur : « L’Edit de Nantes et l’indifférence hollandaise. L’idée d’une autre tolérance », Revue de Synthèse, 2005/1, p.15-32.
[34] Cf. E.H. KOSSMANN, Political Thought in the Dutch Republic, Amsterdam, 2000.
[35]. Cf. R. A. MASON et M. S. SMITH, A Dialogue on the Law of Kingship among the Scots, op.cit., pp. 162-163 : “Rex Stoicus ex Seneca”.
[36]. Je donne ici la traduction de la version néerlandaise proposée par Ellert de Veer du texte latin qui se trouve à la fin du De jure regni apud Scotos : « Regem non faciunt opes, non uestis Tyriae color, non frontis nota regiae, non auro nitidae trabes : rex est qui posuit metus et diri mala pectoris, quem non ambitio impotens et numquam stabilis fauor uulgi praecipitis mouet, non quicquid fodit Occidens aut unda Tagus aurea ». Buchanan a repris la peinture du roi stoïcien qui figure dans la tragédie de Sénèque, Thyeste, cf. Sénèque, Tragédies, t.II, Les Belles Lettres, Paris, 1961, pp. 102-103.
[37]. Cf. ci-dessus, note 17.